La conférence MiXiT – éthique et diversité dans la tech – A.Neveu, G.Alexandre

L’histoire de la conférence MiXiT

Walid : bienvenue à toutes et à tous pour ce nouvel épisode de Projet Libre. Aujourd’hui on va, et c’est une première, j’ai pas encore fait, mais c’est un projet que je voulais faire depuis longtemps, on va commencer à parler des conférences.

Les conférences c’est quelque chose d’important, en tout cas pour moi. C’est quelque chose d’important parce que c’est là que je trouve la majeure partie de mes inspirations pour les épisodes. Il y a une conférence que je dois avouer je connaissais pas trop avant d’interviewer Agnes Crépet dans son épisode sur Fairphone, c’est MiXiT. J’ai pas pu aller à cette édition, mais par contre j’ai avec moi deux invités qui font partie de l’organisation et qui vont pouvoir nous en parler. Voilà donc MiXiT, c’est une conférence qui se tient à Lyon et qui s’est tenue il y a quelques jours.

Donc avec moi j’ai Audrey Neveu et Grégory Alexandre que je salue et qui vont, voilà, qui vont converser avec moi pour nous expliquer un peu en profondeur d’où vient MiXiT, comment ça s’organise, pourquoi ils font ça, qu’est-ce qu’ils veulent faire dans le futur. Audrey, Grégory, merci d’être là, j’espère que vous allez bien et bienvenue sur le podcast Projet Libre.

Audrey : Merci.

Grégory : Merci beaucoup.

Audrey : merci pour l’invitation.

Présentation d’Audrey et Grégory

Walid : première question un peu rituelle, de vous présenter Audrey si tu veux bien commencer par présenter, nous expliquer un petit peu qui t’es et comment t’as découvert le logiciel libre ?

Audrey : alors moi je suis développeuse sur le projet Spring, plus particulièrement sur la partie Spring Cloud. Je ne saurais pas te dire que je n’ai plus de souvenirs en fait. J’ai l’impression que le libre a toujours fait partie de ma vie. Parce que tu vois déjà quand j’étais gamine j’utilisais du libre, donc pour moi c’est naturel.

Walid : T’es une personne technique?

Audrey : ouais, moi je suis dev, voilà. Je suis dev Java, très précisément.

Walid : t’as fait quoi comme études, juste pour savoir?

Audrey : j’en ai pas fait. J’ai un parcours un petit peu particulier, j’ai fait une reconversion bien avant que ce soit la mode. Donc c’était un peu compliqué, tu vois, c’était il y a 15 ans. Je passais par l’AFPA, c’était rock’n’roll, mais j’ai survécu.

Tu sais, parcours un peu typique de fille de ma génération, on m’a pas du tout poussé là-dedans. Alors que je passais mon temps sur mon ordinateur, tu vois. Mais en fait, c’est même pire que ça. J’avais pris l’option informatique en seconde. Soit tu faisais science-éco, soit tu faisais informatique. J’avais pris informatique, j’ai eu des cours de dactylo, de Word et d’Excel – je tape très très bien- voilà. C’était la grosse déception. Et puis en fait, moi j’avais pas dans mon entourage de gens pour m’orienter. Enfin, tu vois, le parcours un peu typique des mecs dans la profession, c’est que papa il avait ramené un ordinateur à la maison, moi j’avais pas ça, mes parents ils étaient dans le transport, tu vois, donc j’avais pas accès à ça.

Du coup c’est un peu plus tard, après pas mal d’errance, quand j’ai dit « j’en ai marre, je veux faire un truc qui me plaît », j’ai fait un bilan de compétences et quand j’ai fait le bilan de compétences, j’ai découvert le métier de dev et là j’ai dit « tiens, on est payé pour faire des Legos ? mais je vais faire ça! ».

Walid : ok, trop bien, je trouve ça génial. Et toi Grégory ?

Grégory : moi je suis un ancien dev, aujourd’hui je fais plutôt de l’accompagnement orga, tous les sujets d’agilité, tout ça. Je suis un ancien dev et pour le monde libre je t’avoue que je l’ai découvert sur le tard, je suis un ancien développeur .NET C#, donc le ibre, on repassera. Mais donc je l’ai découvert sur le tard, plutôt tiré par la recherche, d’aller chercher des solutions plus éthiques avec toutes les solutions Frama(soft), moins dans mon métier de codeur. Mais c’est vrai, mon métier de codeur je l’ai pas eu si longtemps, j’ai fait aussi du Product Ownership et d’autres métiers de chefferie de projet, donc plus dans les outils à utiliser que dans la pratique, maintenant c’est le pratique de dev.

Walid : comment vous avez découvert MiXiT et depuis quand vous y êtes ?

Audrey : alors moi j’ai découvert Mixit à la toute première édition. J’ai fait toutes les éditions jusqu’à ce qu’il y ait la loterie. Après j’ai encore dû en faire une ou deux en tant que speaker.

Voilà, moi je suis une grosse amoureuse de Mixit depuis le premier jour. Voilà.

Walid : génial, on va en reparler juste après, du premier jour justement. Et toi Grégory ?

Grégory : moi j’ai dû découvrir Mixit en 2012, quelque chose comme ça. Je voulais speaker (NDLR : parler) là-bas et je n’ai pas été pris.

Donc je suis déménagé sur Lyon. Et je suis rentré dans l’orga(nisation), ça m’a semblé être la solution la plus simple pour pouvoir aller à cette conf’. Et donc ouais, je pense que ma première… Je suis arrivé aux alentours de 2014 sur Lyon, je viens de la région parisienne. Et j’ai fait ma première édition en 2015 en tant qu’orga.

Walid : ok, donc vous êtes tous les deux en région lyonnaise ?

Audrey : pas du tout, moi je suis à Montpellier.

Walid : Ah d’accord, ok.

Audrey : justement j’ai des très très forts liens avec Mixit depuis le début. A un moment Agnès m’a dit « non mais c’est bon t’arrête tes coderies tu viens ». J’ai un problème c’est que je ne sais pas dire non à Agnès en fait. Il faut le savoir tout ce qu’Agnès me demande.

Grégory : personne ne sait faire ça.

La génèse de MiXiT

Walid : parlons de la génèse de MiXiT, de quand ça date et pourquoi ça a été créé en fait ? Qu’est-ce qui amène à la création des conférences MiXiT ?

Audrey : en fait ce qui est intéressant c’est que MiXiT, la première édition si je ne me trompe pas c’est 2011, c’est la toute première conf en France. En fait, il y avait les JUGs partout, donc des Java User Groups, mais il n’y avait pas de conf. MiXiT s’est lancé, et celle d’après c’était le JUG Summer Camp.

À l’époque, c’était un truc un peu… Moi, je me souviens que j’avais posé des congés, je payais mes billets de train à mon hôtel pour y aller, parce que j’étais comme une dingue. MiXiT a la particularité par rapport à d’autres de ne pas être purement tech dans le sens où à l’origine c’est le CARA, donc c’est la communauté Agile Rhone Alpes, et le JUG de Lyon qui se sont associés pour faire un événement. Donc c’était vraiment un mix des deux.

Grégory : l’objectif initial c’était, avec le CARA et le JUG, c’était de proposer une conf tech avec une ouverture, oui dev mais comment aussi et comment collectivement et pourquoi dev. Et donc l’idée c’était d’amener ça, d’avoir une conférence tech, mais qui ouvre aussi la manière de le faire.

Walid : et le nom MiXiT ?

Audrey : ah, très bonne question. Là, on ne pourra pas te dire parce qu’on n’est pas des membres fondateurs. Il faudrait redemander à Agnès, Cyril ou Cédric. Mais c’était justement pour représenter cette volonté de mélanger l’agile et du tech et surtout de mélanger des devs et des gens côté métier, que tout le monde se parle.

D’ailleurs, petite question qu’on nous pose souvent, c’est « comment ça se prononce ? » Alors, vous avez le droit de dire « MixIT », vous avez le droit de dire « Mix IT », vous avez le droit de dire mixité, vous n’avez juste pas le droit de dire que vous allez à « la MiXiT ».

Grégory : non, « la MiXiT », ce n’est pas le droit.

Audrey : non, c’est un non. Cette exclusion totale, ce n’est pas possible,

Grégory : le MixIt, vous allez à à MixiT, on sait pas trop

Audrey : vous allez à MiXiT, vous n’allez pas au MiXiT, s’il vous plaît !

Walid : quelle est l’équipe originale en fait ? Elle est composée de combien de personnes ? Une petite équipe au départ ?

Grégory : Oui au début c’était une petite équipe d’environ, il me semble qu’il y avait 3-4 personnes. Je sais qu’il y avait Franck Depierre, alors je ne suis pas sûr qu’on va dire des bêtises sans doute qu’on va oublier des gens. Il y a une personne qui était là initialement, mais je ne sais plus comment elle s’appelle et je ne l’ai pas connue. Mais il y avait Franck Depierre, Romain Couturier, Agnès Crépet et Cédric Exbrayat, il me semble. Et Cyril Lacôte. Cyril Lacôte étaient pas loin. Voilà.

Audrey : effectivement, ça ne devait pas être beaucoup plus que ça.

Grégory : et j’ai pas de monde non plus à te dire. Il y a une personne en plus. Malheureusement, je suis désolé si la personne n’écoute le podcast. Je me souviens pas de ton prénom. Donc là, 2011, donc le contexte, c’est ce que vous expliquez.

Walid: c’est qu’en 2011, le contexte. C’est ce que vous expliquez : il n’y a pas de conférence.

Audrey : non, ça se lance.

Walid : il faut avoir un peu de volonté pour monter ça, quoi. Les premières éditions, c’était quoi ? C’était plutôt amateur ou déjà dès les premières éditions, Il y avait des… Comment dire? Il y avait des sponsors, etc. Comment c’était les premières éditions ? Ça t’a fait bien rigoler quand j’ai dit amateur.

Grégory : la question c’est est-ce que maintenant on n’est plus des amateurs des amateurs ? C’est la question.

Walid : après toutes ces années quand même.

Audrey: c’était rock’n roll les premières années. C’était rigolo. C’était chouette aussi. C’est ce qui faisait partie du charme. Il devait y avoir des sponsors. C’est à peu près sûr.

Simplement, t’as des frais à gérer pour monter ce genre d’événement, tu peux pas le faire gratuitement et j’imagine qu’il y en avait, je t’avoue je m’en souviens plus vraiment.

Grégory : c’était dans les locaux d’Epitech ou d’Epita, les toutes premières ça faisait moins d’une centaine de personnes.

Audrey : Juste la première parce que dès la deuxième ça avait été

Grégory : à Supinfo. Donc on a été quelques années à Supinfo et puis en fait ça a continué à grossir donc on n’en avait plus à Supinfo donc on est parti à la CPE (Campus Université Lyon 1). Voilà, comme il y a toujours beaucoup de demandes on a voulu continuer à grossir.

On est parti à la Manufacture des tabacs et on s’est aperçu qu’on n’aimait pas du tout être gros.

Grégory : on était à 1000. La manufacture, l’idée c’était de monter à 1000 personnes, ce qui a été fait.

Audrey : voilà. Et en fait, c’est une taille d’événement qui ne permet pas de conserver ce qui fait l’esprit MiXiT. Donc on est redescendu et on est rentré à la maison.

Walid : on va y revenir justement après sur ce qu’il fait l’esprit MiXiT. Et là, juste pour savoir, la conférence par exemple en 2024, on parle de combien de personnes ?

Audrey : c’est aux environs de 700 en fait.

Grégory : en incluant les conférenciers, les tips, mais ouais.

Audrey : l’équipe, les sponsors, les orateurs et oratrices et les participants participantes, ça fait 700 personnes. Voilà.

L’équipe de MiXiT

Walid : justement, en parlant d’équipe, de qui se compose l’équipe en fait ?

Audrey : alors aujourd’hui, elle se compose de 11 personnes, dont 6 meufs. On est en supériorité !! Donc, je vais commencer par les filles. Voilà. On a Agnès, évidemment… qu’on appelle, la patronne. Je crois qu’on peut… On nique l’info.

Donc Agnès, la patronne, il y a Anaïs, il y a Amélie, il y a Véronique, il y a Aude. Côté garçons, il y a Romain, il y a Guillaume, il y a Mathieu, il y a Charles, n’oublions pas Charles, et puis Greg et puis moi.

Walid : 11 personnes, c’est l’équipe qui globalement planifie toute la conférence ? Après, il y a des bénévoles supplémentaires qui aident ?

Exactement, t’as les orgas dont le rôle est de préparer en amont la conférence. Donc généralement on se retrouve aux alentours de fin septembre début octobre pour placer nos envies, pour repositionner, pour relancer les trucs, pour faire un morse. Et le jour J on est épaulé de bénévoles. Cette année on en avait une quinzaine je crois, qui vont nous permettre de nous assurer qu’on arrive à accompagner les conférenciers et les conférencières, qu’on arrive à aider les participants à se diriger, à gérer le vestiaire, à gérer les billets en arrivant, à déplacer tous les meubles et à les ranger. Ça fait beaucoup de… c’est une aide… on ne pourrait clairement pas faire ce qu’on fait si y’avait que nous.

Audrey : sans les bénévoles ça marche pas en fait. Voilà. T’as besoin d’une team d’orgas mais si t’as pas le jour J des gens qui sont ultra motivés pour se taper des tâches bien d’un grade, et ben ça marche pas.

Walid : et là, les bénévoles, c’est quoi ? C’est des étudiants ? C’est des gens de votre entourage ? Qui est bénévole en fait ?

Audrey : C’est plutôt des gens de notre entourage. On fait des appels, on ouvre aux étudiants, aux étudiants, mais on en a plus rarement.

Grégory : Avant on en avait beaucoup, on n’avait quasiment que des étudiants. On faisait des appels sur les universités de Lyon qui avaient des services infos. On a la CPE aussi, on fait notre conférence qui nous donnait de la visibilité auprès de leurs étudiants. Avant on n’avait quasiment que des étudiants. On a d’ailleurs de l’orga aujourd’hui qui sont des anciens bénévoles, d’à l’époque où ils étaient étudiants.

Et en fait, ces dernières années, on a eu beaucoup de gens de nos entourages qui avaient vraiment envie de nous filer des coups de main. Il faut savoir que nous aussi on est bénévoles, c’est un truc qu’il faut avoir en tête, c’est que quand on parle en tête et bénévoles, tout le monde est bénévole, il n’y a pas de salariés à MiXiT. Mais des gens qui ont vraiment envie de nous épauler, ce qui est important pour nous, c’est de s’assurer que les gens sont vraiment là pour nous épauler. Et des fois, c’est l’entourage mais un peu loin et donc on s’assure que c’est pas des gens qui veulent juste aller à la conférence. On a galéré à essayer d’avoir un billet et en réalité ça a déjà arrivé une ou deux fois mais c’est pas très grave mais c’est un petit mix aujourd’hui mais on a principalement des gens de notre entourage. Ou des gens qui reviennent aussi, c’est à dire que l’entourage c’est plus des étudiants mais c’est des gens qui ont envie de nous devenir chaque année pour nous aider.

Audrey : on a aussi des anciens orgas, des gens qui n’ont plus forcément l’envie d’être dans tout ce temps long de préparation parce qu’on commence à bosser en septembre, enfin c’est septembre jusqu’à avril, tu vois. Mais qui veulent continuer à nous filer un coup de main.

Donc en fait, typiquement, on a Cédric, on a Cyril, on a Anne-Laure, on avait Horacio cette année, des gens qui ont été orgas et qui maintenant continuent en tant que bénévoles.

Walid : c’est toujours à peu près aux mêmes dates, tous les ans, ou ça change?

Audrey : c’est à peu près aux mêmes dates, oui, parce que tout simplement on se cale sur les vacances scolaires, puisque quand on est en CPE, c’est une école, donc évidemment on ne peut y aller que quand les étudiants sont en vacances.

Grégory : en fait on avait là les deux configurations, c’est-à-dire que quand on est à CPE, l’école nous ouvre les portes parce qu’elle est fermée aux étudiants, par contre quand on était à la Manufacture, au contraire, ils fermaient pendant les vacances. Donc on devait y aller. C’est comme ça que l’on se retrouve généralement vers la fin avril pour les conférences qu’on fait à CPE. Alors que quand on était à la Manufacture, on a fait du fin mai au juin, parce que c’était les créneaux qui leur restaient.

Mais donc aujourd’hui, et je pense pour quelques temps encore, ce sera plutôt fin avril pendant les vacances scolaires.

Walid : dernière question sur l’équipe. Je voulais savoir si vous aviez des profils plutôt complémentaires ? Est-ce que les répartitions des tâches sont finalement assez simples en fonction des compétences des gens ?

Grégory : on n’est pas des compétences d’événementiel, donc là on va se questionner potentiellement sur la sélection des conférenciers et des conférencières. La question peut se poser sur la complémentarité des compétences. Et là, on a pas mal de diversité avec des devs, des gens qui sont plutôt dans la partie méthodologie de travail. On a quelqu’un qui fait du front, du mobile, donc c’est plutôt celui-là. Après, sur le choix, comment s’organise-t-on sur les activités de préparation, là pour le coup, c’est où les gens souhaitent s’inscrire pour pouvoir mener le sujet d’orga.

Les valeurs de MiXiT

Walid : on l’a évoqué tout à l’heure mais j’aimerais bien que vous rentriez un peu plus en détail dedans. C’est quelque chose qui est ressorti de la préparation dont vous vouliez vraiment parler, c’était les valeurs de MiXiT. J’aimerais bien que vous expliquiez un petit peu, tous les deux, quelles sont les valeurs qui sont portées par ces conférences et si aussi ça a évolué depuis le début ou pas ?

Audrey : globalement, si tu veux, je dirais qu’il y a des valeurs qui sont rajoutées, il y a des valeurs qui ne sont pas d’un début. Et il y a des choses qui sont rajoutées parce que tout simplement, 2011 c’est loin. Il y a eu des prises de conscience sur certains sujets qu’on n’avait pas en 2011. Donc en fait, ce qui était déjà présent en 2011, c’était une volonté forte en termes d’accessibilité, notamment en termes de prix, parce que l’idée c’était d’avoir un prix d’entrée très très bas pour que les gens. Si les gens devaient se le payer eux-mêmes, ce qui était mon cas à l’époque par exemple. Et j’étais junior, donc je n’étais pas payée des milles et des cents, mais je pouvais me payer mon entrée à MiXiT.

Et puis aussi sur l’accessibilité en rapport au handicap, puisque très vite il y a eu de la vélotypie de mise en place par exemple. Il y a eu la salle d’allaitement aussi, c’est arrivé très tôt. Après il y a toujours eu aussi une volonté de mixité des publics, essayer d’avoir pas un public à 95%…

Grégory : dis-le, dis-le!

Audrey : d’homme blanc, hétérosexuel, cisgenre et développeur.

Walid : voilà!

Audrey : donc ça c’est un travail de longue haleine qu’on continue. Et puis après, il y a des choses qui naturellement sont venues se rajouter. Tu vois, par exemple, le premier MiXiT, il y avait des goodies. J’ai encore les goodies, le premier MiXiT. Et en fait, les goodies, très rapidement, ils ont dégagé parce que écologiquement, c’est pas… Enfin, globalement, dans la team, tout le monde est aligné sur l’aspect écologique, donc ça fait partie des choses qui en dégageaient. Et puis, il y avait aussi, par contre, dès le départ, quand même l’envie de faire un truc orienté sur l’éthique, dans l’idée de faire réfléchir les gens, ouvrir des horizons aux participants et participantes sur leur faire prendre du recul sur leurs responsabilités. Tu vois, dans une profession qui a quand même un impact sociétal, je pense qu’il est difficilement comparable dans l’évolution humaine et en termes d’échelle, je dirais. Et puis leur ouvrir les yeux sur d’autres sujets qui sont complètement dans ce que nous on appelle les aliens. Voilà, ça, ça a quasiment toujours été là et ça reste le cœur.

Grégory : on peut se dire que d’année en année, on essaie juste de renforcer, ça se renforce de plus en plus. C’est-à-dire que typiquement le sujet de la Vélotypie, au début, c’était… On expérimentait des petites choses.

Walid : attends, tu peux rappeler Vélotypie, ce que c’est ?

Grégory : vélotypie, c’est un service. C’est des personnes qui vont avoir des claviers spéciaux et qui vont faire de la transcription de ce qu’ils disent par l’écrit, qui permet aux personnes qui sont sourdes ou malentendantes de pouvoir suivre la conférence.

À la base, on était mené des expérimentations. Aujourd’hui, on est accompagné d’une société qui s’appelle System Risp. Cette année, on est monté à trois salles en parallèle. On avait fait que deux. Avant, on en avait une, après deux, et aujourd’hui, c’est trois. Parce qu’on a vraiment envie de ça, on sait qu’on peut s’améliorer, il y a des choses qu’on doit mettre en place. Ça demande toujours des moyens, c’est toujours une réflexion à avoir. Mais ça fait partie de ce qu’on veut mettre en œuvre et donc globalement ces valeurs de mixité, d’accessibilité, de respect, de réflexion sur notre société d’année en année se renforcent, elles prennent pas mal d’espace dans la conférence pour nous à bon escient.

Walid : et je me demandais si en dehors de la conférence en elle-même, c’était des actions, des choses que vous meniez à titre individuel, et donc la conférence était juste un prolongement de ça?

Audrey : globalement, tu ne rejoins pas l’organe MiXit si tu n’es pas aligné avec les valeurs, parce que tu as passé un sale moment, tu arrives au Wokistan, donc c’est rude. C’est d’ailleurs pour ça, tu vois, quand Agnès m’a dit « non mais c’est mort tu viens « c’est que le fit était naturel c’est tout ce que j’aime c’est tout ce que je veux défendre dans ma vie de tous les jours donc et je pense que c’est à peu près pareil pour tout le monde dans l’équipe enfin.

Walid : donc vous êtes tous très très engagés, en fait formuler comme ça ?

Grégory : voilà après tu peux être engagé tu vois on a tous en tout cas cette ça qui nous reste sur le côté de la tête je vais pas je vais pas parler pour pour les co-orgas et dire chacun comment il s’engage. Mais clairement, comme le dit Audrey, si t’as pas un questionnement majeur sur ces choses là, si t’as pas une ouverture en tout cas sur tous ces sujets là, ça va être compliqué dans l’orga.

Audrey : tu peux ne pas être aligné avec nos valeurs et venir à la conf et je pense passer un bon moment malgré tout, mais dans l’orga, ça serait rude. Ça serait très très rude. Déjà parce qu’il faudrait supporter mes blagues sur les mâles hétérosexuels cisgenres, donc voilà.

Grégory : ah bah ça fait pas mal.

Les financements de MiXiT

Walid : il y a quelque chose qui m’intéresse, c’est beaucoup sur le podcast de manière générale, c’est le financement. Comment les choses se financent, comment les projets se financent, etc. Et là, comment la conférence se finance en fait.

Quel choix vous avez fait ? Là tout à l’heure, on a parlé du fait que l’entrée était payante. Oui. Je voudrais bien comprendre un peu quel est le modèle économique que vous avez autour de ça. Quels sont les gens qui vous soutiennent ? De quelle manière ? Je suis assez preneur d’en savoir plus.

Grégory : Nos sources de revenus, il y en a deux. C’est le sponsoring et la billeterie. Aujourd’hui, on a la chance d’avoir des sponsors qui nous suivent d’année en année, d’autres qui viennent. Je pense qu’on a énormément de conférences, on n’est pas exceptionnel par rapport à ça, je pense qu’on est assez aligné avec d’autres conférences. On a différents packs qui permettent d’avoir différents niveaux de visibilité. Ce qui est cool, c’est qu’encore une fois, on a des sponsors qui viennent ici parce qu’il y a aussi des valeurs.

Walid. quel type de sponsors vous avez ? C’est plutôt des éditeurs ? C’est plutôt quoi ?

Grégory : des sociétés de services, des ESN, des éditeurs.

Audrey : on a les deux, on essaye dans la mesure du possible d’avoir un équilibre entre les deux, parce que sinon tu te retrouves en concurrence, c’est pas forcément cool.

Donc voilà, pour que ça reste chouette pour les sponsors également, on essaye d’avoir un équilibre là-dessus aussi. Peut-être la petite différence de MiXiT, c’est que nous n’acceptons pas les sponsors qui participent au réchauffement climatique de quelque manière que ce soit, vendre des armes, s’ils ont été condamnés pour des faits de harcèlement moral, de harcèlement sexuel au sein de la société, des choses comme ça, bah tu peux pas être sponsor de MiXiT. Voilà.

Walid : Ça paraît assez logique vu ce que vous avez dit avant…

Grégory : et après on a la billetterie . Historiquement, alors tu savais peut-être tout tout tout tout dès le début à combien c’était, c’était aux alentours de 50 euros.

Audrey : c’était 50 euros de mémoire.

Walid : ça a toujours été payant donc ?

Audrey : Oui.

Walid : c’est un choix dès le départ ?

Audrey : quand tu organises une conférence, tu loues les locaux évidemment, tu vas avoir la régie technique à payer, tu vas avoir le traiteur, tu vas avoir pas mal de frais annexes qui vont venir se rajouter. Pour être complètement transparent, aujourd’hui le prix du billet c’est juste le traiteur. Les participants finalement ne payent que pour leur repas. Et donc malheureusement on a dû augmenter le billet à 75 euros parce qu’on s’est pris plus de 15% d’inflation. Voilà. Mais c’est ce qui nous permet de rester à l’équilibre parce que le sponsoring permet de payer tout le reste.

Et ça fait partie de ce qui nous limite. Parce que par exemple, en accessibilité, on aimerait faire beaucoup plus de choses, mais les prix montent très vite. C’est pour ça qu’on ne peut pas par exemple équiper toutes les amphis en vélotypie, toutes les salles en vélo typique parce qu’on n’a pas les moyens tout simplement.

Walid : il y a cette loterie là, j’aimerais bien vous parler. Je dois avouer que j’ai un peu découvert les conférences MiXiT sur le tard et que déjà il n’y a pas tant de conférences que ça qui sont payantes à part des événements très professionnels etc. Donc j’étais vraiment curieux de savoir pourquoi, donc je suis content d’avoir eu la réponse, c’est assez cool.

Et puis la transparence sur ce que ça paye, donc ça c’est…

Audrey : je me permets, je pense que c’est parce que tu as plus une vision des conférences côté libre.

Walid : oui.

Audrey : dans la communauté Dev, la communauté Java par exemple, toutes les confs ont un prix d’entrée. Et nous on est très très bas.

Grégory : et pareil dans les communautés agiles, c’est la même chose. C’est-à-dire que la plupart des confs sont à peu près à ces tarifs-là, mais ils sont payants quand même. Et moi je suis surpris, je suis tombé sur des conférences, c’est des prix à 300, 400, 500 euros le billet, et là, dès que tu sors même de nos milieux de dev, c’est des conférences qui ont des tarifs qui sont des trucs de malade.

Audrey : ouais, même en restant en dev, tu vois, il y a une conf que j’adore qui est DDD Europe. C’est une conf fantastique, c’est un truc que j’aime énormément, c’est hors de prix quoi, c’est plus de 500 balles, si ton employeur te le prend pas en charge c’est chaud quoi, parce que c’est Amsterdam donc voilà, c’était une parenthèse mais en fait dans l’écosystème dev c’est la pratique courante parce qu’il faut faire les frais, tout simplement.

Walid : j’ai été biberonné au Fosden et tout ce que ça donne.

Audrey : c’est ça.

Grégory : c’est ça.

La loterie

Walid : donc par contre, une des particularités, c’est la loterie. Alors ça, j’ai vraiment découvert. J’aimerais bien que vous nous expliquiez un peu pourquoi c’est en place et à quoi ça vous sert en fait.

Grégory : en fait, on a mis ça en place parce que historiquement, c’était une billetterie pratique. T’arrivais, le jour J, d’ouverture, et bien c’était parti. Alors au début, c’était en une seule salve et la salve, en 10 minutes, en un quart d’heure, on n’avait plus rien. Allez, en trois quarts d’heure, je vais pas abuser. Et en fait, après, on s’est mis à le faire en trois salves et c’est pareil, quoi.

En 30 secondes, y avait toutes les places qui partaient. Et finalement, on avait une réflexion sur la justice de ça, c’est-à-dire qu’en fait, qui a accès à ça ? Les personnes qui sont derrière leur ordi, à ce moment-là, on avait même des gens qui ont créé des bots pour pouvoir remplir le formulaire et comme ça, hop, c’était plus rapide à cliquer dès que le bouton apparaissait et donc ça questionnait nous deux choses c’était l’équité de dire « bah il y a des gens peut-être chaque année en fait ils se font avoir mais c’est pas c’est pas très cool et c’est toujours les mêmes qui vont revenir et ça questionnait aussi la mixité de notre public c’est à dire que bah c’est bourré de biais c’est à dire que c’est des personnes qui sont pas en réunion à ce moment là qui peuvent venir.

Audrey : qui n’ont pas les enfants à emmener à l’école

Grégory : voilà tu vois il y avait plein de choses. Donc la loterie c’était pour nous le moyen de pouvoir temporiser, c’est-à-dire permettre un maximum de gens de venir, de se dire tiens ça m’intéresse et ensuite l’aléatoire fait le job.

Walid : en tout cas dans les conférences que je connais j’avais jamais entendu parler je pense de loterie, je sais pas si dans d’autres conférences que vous connaissez il y a ce mécanisme là.

Audrey : pour te donner un état des lieux en fait dans les confs de dev la problématique de toutes les places partent en 10 minutes elle est universelle. C’est-à-dire qu’on n’a pas une conférence de dev où c’est pas une problématique. Donc je crois qu’il y a d’autres confs qui songent à nos imités parce que just ement ça les embête aussi. C’est une pratique très commune dans les Unconference, notamment les Socrates. Les Socrates pratiquent beaucoup la loterie.

Walid : mais au moment où vous avez mis ça en place, vous étiez les premiers ?

Audrey : oui. Bon, Google I.O. l’a fait en nous, voilà. Parce que Google I.O. avait la même problématique. Parce que pour te donner un ordre d’idée, on reçoit deux fois plus d’inscriptions à la loterie que qu’on a de place à vendre.

Donc Google I.O. l’avait fait et je crois que l’idée est venue de là. On s’en est inspiré à ce moment-là en se disant que c’est ça qu’il faut faire parce que c’est vraiment pas juste autrement.

Walid : Il y a un truc que vous n’avez pas mentionné et je me permets de le rajouter parce que ça me semble être important, c’est que, ok, t’es pas sélectionné mais contrairement à d’autres conférences, je pense typiquement Open Source Experience, les confs sont filmées.

Audrey : ouais.

Walid : comme d’autres événements, les confs sont filmées, ce qui fait que, bah, même si comme moi t’as pas pu y aller, et bien au moins tu vas pouvoir regarder tranquillement chez toi après les conférences. Ça ajoute de l’équité, ce qui fait que, bon, t’es pas là physiquement dans l’événement, mais bon, tu peux quand même avoir le contenu ce qui fait que bon bah t’es pas là physiquement dans l’évènement mais bon tu peux quand même avoir le contenu.

Audrey : exactement.

Grégory : il y a ça et il y a aussi une règle qu’on a fixée la troisième fois on mettait ça en place c’est que si tu t’es fait refuser trois fois tu l’indiques à l’orga et tu as ta place. Si tu t’es inscrit à la loterie et tu infos l’orga et tu peux en bénéficier. Trois fois de suite.

Walid : dernière question sur le financement. Le financement vous permet de ne pas perdre d’argent ou vous permet de gagner de l’argent ?

Grégory : il ne permet de ne pas en perdre. Clairement, aujourd’hui, on essaie au maximum d’être à l’équilibre principalement.

Audrey : ça rentre pile poil.

La place dans l’écosystème et les influences

Walid : ok. On parlait des événements. Je voulais savoir un petit peu, justement par rapport un peu à votre place dans tout cet écosystème, je voulais savoir un petit peu, est-ce que vous avez des rapports avec d’autres événements, libres ou pas libres ? Est-ce qu’il y a des événements qui vous inspirent, donc vous inspirez ou qui ont inspiré pour la création de MiXiT ?

Audrey : alors qui ont inspiré pour la création, je ne pense pas, parce qu’on aime beaucoup en fait. Les gens de Paris Web c’est des gros copains de nous, on s’aime fort, on s’aime d’amour.

Walid : mais attends, je pense que Solution Linux à l’époque c’était là avant ?

Audrey : alors moi je te parle vraiment par rapport à l’écosystème Dev en fait.

Walid : ok d’accord.

Audrey : par rapport à l’écosystème Dev, notamment Dev Java, c’était la première. On pourrait redemander au fondateur, je pense pas qu’il y ait forcément d’inspiration.

Grégory : il y a des forcément des choses qui se passaient, forcément, même avec le CARA, il y avait aussi des conférences agiles, on retrouve des similarités, des tracks, des machins. Effectivement, ça va demander au fondateur et aux fondatrices ce qui a amené tout ça. Après, sur la recherche de l’ouverture, le côté inspiration, c’était de regarder un peu ce qui se faisait aussi dans l’écosystème, de comment on parle de la tech, comment on partage pour se dire, nous on a envie de partager aussi d’autres choses pour ce même public. Et donc oui, Paris Web aujourd’hui comme inspiration c’est clair.

Audrey : voilà et puis on est aussi assez profs de la AFUP, l’association française des utilisateurs de PHP, qui sont aussi des copains, on s’entend bien, on est alignés en termes de valeur, donc voilà, c’est nos chouchou.

Walid : je voulais aussi savoir un peu votre implantation par rapport avec la ville, avec les institutions, avec les groupes d’utilisateurs autour, etc.

Grégory : ça représente la conférence en elle-même, j’ai envie de dire. C’est-à-dire qu’elle s’est appuyée sur le JUG et sur le CARA pour l’organisation initiale, avec une recherche en termes de thématique. On n’a pas de prétention d’impact local ou de choses comme ça sur notre intégration avec les communautés, c’est pareil, il n’y a pas de choses qui se passent en dehors de la conférence.

Walid : une de mes questions, c’était typiquement, tu as des confs de logiciels libres et à côté de ces confs de logiciels libres, comme les gens sont là, ils en profitent pour faire des meet-up, pour faire des réunions annuelles ou tu vois.

Audrey : on n’a pas de choses comme ça. Après, on a des… Enfin, c’est assez… Le côté intéressant, parce que dans ta question initiale, tu nous parlais de la ville de Lyon, etc.

Il y a quand même deux choses importantes à noter. C’est que d’abord, la métropole nous offre notre soirée. C’est-à-dire que le jeudi soir, il y a une soirée pour les participants et participantes. Et en fait, la métropole nous met à disposition la chapelle de la Trinité, qui est un lieu magnifique, absolument splendide. Elle nous offre le traiteur et c’est leur manière à eux de soutenir un événement local.

Et c’était très rigolo, tout début d’année, quand on commençait à préparer, on a quelqu’un de la ville de Lyon qui nous a appelé, qui est rentré en contact avec nous en disant  » est-ce que vous expliquer ce que vous faîtes, ça m’intéressait pour m es équipes ». Donc il est venu cette année. Peut-être que nous aurons dans les participants et participantes des prochaines éditions des services informatiques de la ville de Lyon.

Grégory : Pour l’implantation, je me souviens qu’en 2019 je crois, Agnès avait rencontré des personnes délégués à la ville à Lyon qui ne nous connaissaient pas. Personne ne nous connaît. On n’a pas de visibilité du tout. À part dans nos écosystèmes, c’est-à-dire dans nos réseaux sur Lyon, on est tous un peu en relation avec les communautés locales qui nous connaissent un petit peu. On a Lyon Tech Hub, on a Java User Group, on a le CARA, etc. Mais en dehors de ça, on est invisibles. Et donc la personne se disait « mais comment ça c’est possible, ça fait combien de temps que vous faites ça? » Sachez, ça fait 6 ans ou 7 ans que vous rameutez 700 personnes sur Lyon qui viennent de toute la France pour parler tech, pour parler éthique, etc. Elle était complètement hallucinée d’apprendre qu’il y avait ça dans la ville. Non mais très nul.

Audrey: oui d’une nullité. Voilà.

Grégory : jusqu’à cette année.

Audrey : jusqu’à cette année parce que tu vois, on a fini par l’admettre en fait, on a fini par regarder les choses en face. Et on a engagé quelqu’un pour se charger de la com’ justement parce que c’est un vrai métier et parce que personne… Pour le coup, c’est un point que personne n’avait vraiment envie de prendre dans l’équipe. Enfin tu vois, à chaque fois c’était de la souffrance pour la personne qu’il prenait en charge.

Sauf Cyril qui, pendant des années, gérait Twitter et ça le faisait marrer. Donc on avait un ton… En plus, on bénéficiait de l’humour de Cyril, alors il faut l’aimer. Moi, j’adore, mais c’est assez mordant. En fait, cette année, on a choisi de se faire aider. En fait, le truc, c’est que, comme justement, tu vois, on a cette notion de loterie. Donc il faut que les gens aient les informations à temps pour pouvoir s’inscrire, etc.

Donc c’est vraiment important d’avoir une communication qui soit efficace et voilà donc on a Alice maintenant qui fait ça très bien, qui en fait des bisous.

MiXiT et la communication

Walid : parce qu’en fait c’était toutes mes questions suivantes sur un peu quel est un peu votre lignée éditoriale, sur quel réseau sociaux vous communiquez ?

Audrey : ah bah ça c’est le moment qui fait mal puisque en fait on est obligé d’aller sur des plateformes qu’on n’aime pas mais parce que c’est là où sont les gens. Donc en fait, on va se dire qu’on est sur des plateformes qu’à titre personnel, on n’utilise pas, tu vois. Moi j’ai un compte Twitter que je n’utilise plus depuis 4 ans, sauf en cas d’urgence absolue et voilà, pour vraiment qu’on me dise « non, il faut que tu ailles lire ce message, sinon je n’ouvre pas cette saloperie ».

On a repassé, on était sur Viméo pendant des années et puis Alice nous a dit « ouais, enfin les enfants, vous êtes mignons, mais tout le monde est sur YouTube ». Et nous on était là « ouais mais ouinnn! » Bah oui mais bon, il y a un moment, c’est savoir ce que vous voulez faire. Vous voulez survivre ou pas ? Voilà. Faut aussi aller là où sont les gens. Si tu veux que ta conf elle continue à avoir du succès, que tu continues à attirer des sponsors et des participants et participantes. Donc voilà.

Donc ça fait qu’on s’est fait, on s’est pris, c’était très drôle. C’était vraiment très très drôle parce qu’en keynote d’ouverture du premier jour, on avait Olivier Alexandre qui est un chercheur qui a bossé sur la Silicon Valley.

Walid : j’ai lu son livre.

Audrey : et du coup il nous a collé un petit taquet au passage.

Grégory : en introduction dès le début.

Audrey : mais nous on a tout à fait marrer.

Grégory : oui c’était cool.

Audrey : voilà mais il y a des raisons, il y a des raisons, on n’est pas… c’est pas de gaieté de coeur tu vois, enfin on préférait largement faire toute notre com’ sur Mastodon et c’est tout, sauf que sur Mastodon il y a quasiment personne qui nous suit donc c’est pas qu’il faut centraliser les efforts malheureusement.

Grégory : on est sur Mastodon et BlueSky, on s’est mis aussi sur BlueSky, mais voilà aujourd’hui c’est pas encore des réseaux qui ont été… y’a pas eu une migration massive. J’y ai cru, j’y ai cru, j’ai allé sur Mastodon, j’y ai cru, j’ai fait ah, j’ai allé sur Blue Sky, j’y ai cru, j’ai fait… Ah. Et en fait, aujourd’hui, on le voit bien, on a eu de plus en plus…

Depuis le Covid, en fait, il y a eu un ralentissement, depuis le rachat de Twitter par l’autre coco. Pareil, il y a eu pas mal de choses qui étaient désertées. Historiquement, notre communication, elle était principalement sur Twitter. Les gens lisent pas les mails, ou ça tombe dans les spams. Voilà, nous, on n’a pas des gens qui vont faire du phoning auprès de tous les participants pour leur informer de l’existence de la prochaine édition.

Donc nous, c’est les réseaux sociaux notre outil principal. Et ça a été un vrai débat entre nous, avec Alice, quand on a commencé à discuter de ça, parce qu’on ne voulait pas revenir sur YouTube, Twitter on avait envie de le déserter nous aussi. Avec le Covid, il y a eu des pertes sur la visibilité sur les réseaux, mais aussi un petit ralentissement aussi sur les inscriptions. Et donc on se dit, il y a peut-être un lien. Et à un moment donné, il faut prendre un choix, il faut faire un choix.

Audrey : là, ça revient à la normale tout doucement, mais vraiment tout doucement. Et donc on s’est fait un peu peur, tu vois, les deux, trois dernières années, c’est compliqué.

Walid : mais moi, il y a un des sujets que je traite très régulièrement sur le podcast parce que j’adore, enfin c’est un de mes sujets de prédilection, c’est tout ce qui est autour du fait divers, de liberté en termes de décentralisation etc. Et c’est des sujets qui sont passionnants avec Peertube par exemple etc. Bien sûr que c’est mieux pour avoir de l’audience de faire de la pub sur des réseaux privateurs quoi, mais il y a tout ce nouveau monde qui se développe, qui pour l’instant est un peu embryonnaire mais dont les possibilités sont vraiment… Moi ça m’excite beaucoup.

Grégory : on est complètement alignés sur cette ambition-là aussi. Après, il y a deux choses qui rentrent en compte. Il y a l’énergie que ça demande de se démultiplier et qu’aujourd’hui, comme le disait Audrey, on s’est fait un petit peu peur. Vraiment, 2021, on a sur notre édition à distance en ligne, je pense qu’il y a des gens qui ont été un peu surpris parce qu’on avait choisi que des keynotes aliens. On n’avait pas du tout de sujet tech. Et donc, je pense qu’il y a beaucoup de gens qui viennent nous voir pour des sujets tech, on nous a aussi reproché des dernières leçons, c’est pour ça que cette année on a décidé de rééquilibrer et de ramener plus de tech et donc on a quand même perdu un peu de visibilité là dedans et pour l’instant notre objectif c’était d’être sûr qu’on arrive à remplir la conférence, c’est aussi ça. Donc demain si ce n’est plus un sujet, c’est à dire qu’on n’a plus de problème par rapport à ça en termes de visibilité, les gens sont informés, etc. Notre ambition, elle est d’aller vers des choses qui correspondent à nos valeurs, comme le disait Audrey, si on avait le choix, on quitterait plein de plateformes sur lesquelles on est revenu cette année. C’était pas de gaieté de cœur, c’était vraiment pour nous de la nécessité.

Audrey : c’est horrible à dire, mais je peux pas te dire à quel point je suis soulagée parce que c’est Alice qui ouvre les messages. Moi, j’ai pas à ouvrir cette saleté de Twitter. C’est juste parce que quelqu’un a posé une question et donc au passage tu vois toute la quantité de déchets qui est déversé.

Walid : je comprends très bien.

Audrey : et voilà, c’est pas un sujet facile et c’est pas un sujet où on est forcément le plus à l’aise mais on fait des choix qui sont nécessaires pour la survie de la conf.

Walid : c’est très chouette de pouvoir en parler et de voir qu’effectivement c’est jamais blanc ou noir pour tout. Quand tu choisis des outils parfois c’est pas exactement ce que tu voudrais. C’est jamais exactement comme tu veux.

MiXiT et le logiciel libre

Pour rester un peu dans ce sujet là, je voulais un petit peu connaître votre rapport au logiciel libre. Donc en fait j’aimerais bien que vous nous expliquiez un petit peu quelle est un peu la place du logiciel libre et tout l’écosystème libre dans MiXiT, parce qu’il y a des associations qui viennent là, qui viennent parler, etc. Donc c’est un événement que moi j’ai connu à travers mes réseaux de libristes.

Audrey : en fait, nous de manière générale, on est toujours tr ès très très content quand on a des gens qui viennent nous parler de logiciel libre sous différentes approches.

Parce que, tu vois, par exemple, cette année, on avait Pierre-Yves, un des cofondateurs de Framasoft, qui est venu nous parler de Framacloud. Mais on avait aussi Matthieu Faure. Mathieu travaille chez ADULLACT. L’ADULLACT en fait, leur job c’est d’installer le libre dans le public, donc qui est venu nous faire un retour là-dessus. On a L’APRIL qui est venu nous parler de comment on met plus de diversité dans le monde du libre parce que je me rendais compte qu’au niveau de leurs adhérents et adhérentes, ils avaient un ratio qui n’était pas celui qu’ils voulait.

De manière générale, ça fait partie de nos valeurs, donc on est toujours très heureux quand on a des sujets libres qui sont proposés.

Grégory : c’est au milieu du reste de la conférence, on réfléchit à notre public, à ce qui va leur apporter quelque chose aussi. Avant, notre tagline (NDLR : slogan) c’était « des idées pour tout de suite ». Et donc forcément, on se questionne sur aujourd’hui c’est quoi les sujets qui sont dans toutes les bouches et donc on ne veut pas surfer sur les trends (NDLR : tendances) mais on essaie d’amener aussi des choses dont on n’a pas parlé et dont il faut un petit peu parler.

Et l’exemple pour nous c’est que cette année on a eu un sujet sur Figma. Figma s’est explosé ces derniers temps.

Walid : tu peux juste expliquer pour les gens qui ne sauraient pas ce que c’est que Figma ?

Grégory : Figma c’est un… je n’ai tant que de le faire, je suis non technique de l’histoire. Il me semble que c’est un outil pour les UX, en fait, de prototypage et pour faire des wireframes (NDRL : des maquettes fonctionnelles). On a quelqu’un qui nous avait proposé un sujet sur Penpot. On s’est vraiment posé la question, c’est-à-dire aujourd’hui on a eu une Track design parce qu’on voulait pousser aussi toujours dans cet esprit d’ouverture. On a assez peu de sujets globalement dans nos appels à orateurs et oratrices et donc on s’est dit bon ben en fait on a très peu de sujets mais on en a deux qui vont parler wireframe, Penpot et Figma, qu’est-ce qu’on fait ?

On s’est dit pour l’instant il faut peut-être d’abord qu’on parle de Figma comme ça au moins ça c’est fait et à un autre moment on parlera peut-être de solutions alternatives comme on le fait pour… si il y a quelqu’un qui nous propose une version libre d’un sujet qui est une autre proposition mais c’est bon on sait quelle est la proposition principale. Ok je vais aller chercher ce qui se passe ailleurs mais je pense que c’est un réflexe qu’on va avoir encore une fois la nuance est importante Penpot c’est une alternative open source, pas de logiciel libre c’est de l’open source.

Walid : de ce que je comprends c’est qu’en fait vous avez une continuité sur les années des sujets.

Audrey : bah oui.

Walid : vous essayez d’en avoir une.

Audrey : on essaye d’avoir une… d’avoir quelque chose de cohérent. Effectivement voilà là typiquement l’exemple qu’a cité Greg, on n’avait jamais eu de sujet dessus donc ça nous semblait plus facile pour les participants et participantes de commencer avec la référence et puis une fois que tu as introduit la référence, tu peux commencer à parler des alternatives. Mais si tu arrives tout de suite avec les alternatives, les gens ne vont pas forcément faire le lien.

En fait, Figma, ils n’ont peut-être pas pratiqué, mais ils en ont peut-être entendu parler et donc ils vont vouloir creuser le sujet. Si tu arrives direct avec l’alternative open source, là par contre, ils ne vont pas savoir de quoi tu parles et du coup, ce n’est pas confortable non plus pour la personne qui a proposé le sujet parce qu’elle risque de se retrouver devant une salle vide. Il y a cet équilibre à trouver qui n’est pas toujours évident. On essaie de faire au mieux.

Walid : vous avez par hasard des exemples qui sont passés dans les années précédentes?

Audrey : là, tu en demandes beaucoup. Je me demande

Grégory : s’il faut se souvenir de toutes les conférences…. Je n’ai pas d’exemple.

Audrey : il y a des sujets qui nous marquent plus que d’autres, donc on sait qu’on en a parlé, mais typiquement sur les problématiques outils, ce n’est pas forcément ce qui va nous rester le plus en tête. Donc, il faudrait reprendre… Après, les vidéos de toutes les éditions précédentes sont sur le site. Elles sont accessibles, donc vous pouvez les chercher si vous avez envie de faire un petit peu d’archéologie.

Walid : j’ai ressorti des vidéos de 2008 pour recontacter des gens sur certains sujets, etc. C’est quelque chose que j’apprécie beaucoup.

Les conférences aliens

Walid : mais d’ailleurs je m’aperçois qu’il y a quelque chose qu’on n’a pas défini, vous avez parlé tout à l’heure de conférences « alien » et j’ai oublié de vous demander de définir ce que c’était qu’une conférence alien. Parce que autant tech j’imagine très bien, autant alien c’est quoi ?

Grégory: Alien c’est des sujets qui ne vont ni s’inscrire dans un domaine tech type code quoi et ni s’inscrire sur la gestion de projet, presque pas s’inscrire dans l’entreprise, la gestion de projet ou comment je dev, mais vraiment quelque chose qui est une ouverture soit sur la société en général, une réflexion sur le fonctionnement de notre société. Donc c’est nous, la plupart de nos plénières, la plupart de nos keynotes sont ce qu’on appelle les keynotes alien parce que là, elles viennent basculer sur autre chose. Alors même si on parle de la Silicon Valley, même si on parle de… On va parler de cyber-surveillance, on va parler de la manière de fonctionner de la Silicon (Valley) et d’un point de vue politique et fonctionnement social. Et on va avoir aussi dans les alien des choses qui sont plus légères, entre guillemets. On a parlé de plumes de manchots, on a parlé de comment faire du chocolat, etc.

Audrey : Il y a eu une année, on avait un orchestre ! On avait un orchestre sur scène, avec le chef d’orchestre qui t’expliquait comment ça marchait ! C’est des moments d’envie.

Grégory : et c’est l’idée d’amener une ouverture, une réflexion, une basculée encore ailleurs, d’aller chercher, en ce terme, pas seulement galvaudé, mais de l’inspiration, mais vraiment de pouvoir se dire, « tiens, j’ai une conf dans laquelle j’ai appris les choses pour mon métier de tous les jours, qui vont m’être utiles tout de suite. En même temps, on a parlé d’un truc, mais ça me questionne. Et avec un peu de chance, ça me questionne sur ma propre pratique ».

Le public et la conférence

Walid : et c’est forcément des gens tech qui viennent dedans ? Parce que tu parles d’orchestre, etc. Est-ce qu’il y a des gens non tech qui viennent dans ces conférences ?

Grégory : En tant que participant ?

Walid : oui, en tant que participant.

Grégory : on a quand même principalement des gens qui viennent de la tech, principalement des développeurs, des développeuses. Vraiment, le gros, gros, gros, gros, gros de notre public, c’est des développeurs, des développeuses. On va avoir des gens qui font la chefferie de projets opérationnelle, des gens qui s’intéressent à ces sujets là. Mais dans le gros du public, c’est quand même des développeurs et des développeuses.

Audrey : par contre, ce qui est hyper intéressant, c’est que globalement, à chaque fois qu’on a des gens qui viennent, tu vois, par exemple, l’an dernier, on avait une mathématicienne, on a des sociologues, on a des historiens, on a des gens qui viennent vraiment du milieu où là, c’est nous les aliens pour eux, en fait, tu vois.

Grégory : Un conférencier, conférencière.

Audrey : et ils adorent l’expérience et ils nous disent « mais j’ai découvert un truc, c’est extraordinaire, j’ai discuté avec plein de gens, c’est fascinant votre métier », etc. C’est assez rigolo en fait, parce que pour nous c’est eux les aliens, mais en fait pour eux c’est nous. Ils passent un super moment et ils s’éclatent. C’est un truc assez chouette, assez magique.

Les retours de l’édition 2024

Walid : si on passe maintenant sur l’édition 2024… Ce qu’il faut dire c’est qu’au départ je voulais faire cette conférence avant l’édition 2024 et que finalement on fait l’enregistrement après. Donc ça tombe bien maintenant vous allez pouvoir me dire un petit peu comment ça s’est passé cette édition 2024. Est-ce que pour vous c’était une bonne édition et est-ce qu’elle a tenu ses promesses par rapport à ce que vous étiez fixé des objectifs ?

Audrey : alors moi c’est clairement mon édition coup de cœur. J’en ai fait plein en tant que participant, j’en ai fait plusieurs en tant que speaker. J’ai même été une année avec ma meilleure amie, j’ai fait la keynote de clôture, donc c’était dans les débuts. C’était vraiment dans les tout débuts. Et c’est ma quatrième édition en tant qu’orga.

En fait, je pense qu’au-delà du contenu, on était très content du programme globalement, on était très content des keynotes qu’on a réussi à avoir. Mais en fait, ce qui me fait plaisir, c’est qu’on continue à travailler très fort sur l’aspect diversité, et notamment pour s’assurer que mon kit soit une safe place (NDLR : lieu sûr).

Tous les ans, on a des retours des participants et des participantes, mais aussi des sponsors, etc. En disant, « c’est incroyable, je me sens vraiment bien dans l’événement, j’ai passé un super moment, j’ai rencontré des gens super sympas, j’ai eu plein de discussions un peu folles ». Je ne saurais pas expliquer les raisons pour lesquelles…

Moi, j’ai commencé, je fais du bénévolat depuis que je suis dev et j’ai toujours fait du bénévolat autour du dev et c’était pour rendre un peu à la communauté tout ce qu’elle me donnait. Et enfin je fais ça et j’en prends dix fois plus dans la tronche parce que quand je vois les gens super heureux à la fin, c’est incroyable quoi, tu vois. Je sais que moi typiquement en général quand on clôture je suis au bord des larmes de bonheur mais je suis au bord des larmes, donc voilà.

Grégory : on a eu des excellents retours sur cette édition, aussi comme je le disais, on voulait rééquilibrer,on nous avait reproché post Covid d’avoir un peu moins de tech. On avait essayé de voir un peu comment on pouvait… On a démultiplié d’année en année les types de sujets, et les types de techno aussi, puisqu’avant c’était que du Java, donc on a dit on va parler d’autre chose, et donc forcément ça réduisait pour tout le monde. Et cette année on a décidé de remonter et de réaffirmer la partie tech, et donc de donner plus d’espace par rapport aux autres types de celui-là. Et je pense qu’on a eu des retours assez positifs par rapport à ça, que des bons retours. Alors on n’a pas reçu encore le sondage, peut-être que ce sera la douche froide.

Mais non, vraiment, ça s’est senti pendant l’événement. On avait un feed-back qui était absolument génial d’une personne à un stand qui nous disait « J’ai besoin de vous dire un truc ». Enfin, pas à moi, mais je crois qu’elle t’a fait le nom de retour Audrey, elle a besoin de te dire un truc. D’habitude il y a toujours quelqu’un qui vient m’emmerder quand je suis derrière mon stand.

Un peu lourdeau et qui vient me draguer. Il n’y a personne qui l’a fait. C’est la première fois que ça m’arrive, personne n’est venu me parler un petit peu pour me dragouiller. C’est des petits trucs comme ça. Je l’ai vu à la toute fin, ils étaient en train de démonter leur stand. Je lui ai papoter avec eux et je lui ai dit c’est ton premier MiXiT parce que je ne l’avais jamais vu.

Elle me dit ouais c’est mon premier. J’ai la première conf où je me fais pas emmerder.

Grégory : ouais. Et là tu te dis bingo quoi, c’est que t’as construit un truc quand même. Et par rapport à ce qui s’était fixé, c’est encore une fois, d’année en année, on essaye de mettre des petits trucs en plus. Je disais tout à l’heure, on a mis une troisième salle en vélotypie. On a un système qu’on a mis en place depuis quelques années qui s’appelle la Mixette, dont l’objectif est de financer des associations.

Et je pense que cette année, ça a vraiment super bien fonctionné, c’est-à-dire que tout le monde avait compris à quoi ça pouvait servir. Parce qu’en fait c’est un truc qu’on va donner, c’est une petite monnaie qu’on va donner à des participants pour qu’ils viennent financer les associations, mais c’est aussi des monnaies qu’on donne aux sponsors pour essayer de trouver des techniques pour faire du lien avec les participants et je pense que c’est une année où vraiment les sponsors ont su constituer des animations et des choses autour de cette petite monnaie, alors qu’avant c’était la phase de transition. Le but de la Mixette c’est que les sponsors n’amènent plus de goodies. C’est votre truc là, moi j’ai pas ma marque dessus, qu’est-ce que vous êtes gentils de me filer ça entre les pattes. Notre objectif c’était d’arrêter la production de goodies aussi de la part des sponsors et cette année, pour être à l’événement, ils ont super bien adapté leur système à ça et c’était très très chouette. Ça a super bien tourné, on a aussi un truc qui s’appelle MiXiT on Air, en parallèle de la conférence on fait des interviews de gens qui ont donné des conférences, des gens qui font des keynotes, des assos qui viennent nous voir, nous jour J pour parler de différents sujets.

Audrey : il y a des speakers aussi en fait, on prend des orateurs et oratrices de la conf sur des sujets qui vont être suffisamment proches en fait pour qu’on puisse créer une interaction etc. Et on va on va les interviewer pendant les deux jours.

Grégory : et ça ça s’est pas bien marché on a un partenaire qui s’appelle Ikada qui gère toute la vidéo. Tu vois si on a du replay c’est grâce à eux. Ils nous ont créé un studio pour faire ce streaming qui était magnifique avec une qualité d’image et de son qui est dingue.

Audrey : c’est un truc qu’on a lancé c’est Romain et Anne-Laure qui avaient eu l’idée au départ, et on a lancé ça l’an dernier en se disant « vas-y on essaye ». Nous on s’est éclaté à le faire, et du coup cette année on a dit « on se met un petit peu plus de moyens», on s’est payé un joli décor, etc. pour avoir un rendu qui soit chouette. Et c’est vraiment un moment très très cool en fait, c’est vraiment une partie très chouette de MiXiT je trouve.

D’où viennent les intervenants ?

Walid : une question qui me vient comme ça, vos intervenants ils sont français ou ils sont francophones? Vous avez des gens qui viennent de l’étranger pour parler ?

Grégory : on a des gens qui viennent de l’étranger, il n’y a pas de il n’y a pas de sujet, on en a, le seul truc qu’il y a c’est qu’on en a moins et qu’on a arrêté de… alors on paye, que ce soit nos keynoteurs, nos keynoteuses, que ce soit les personnes qui sont passées par l’appel à orateurs ou oratrices, on paye les frais de déplacement, on paye le déplacement, on paye l’hôtel. Par contre, on ne paye pas l’avion.

En fait, on n’avait pas envie, par rapport à ce qu’on prenait, de faire venir des gens qui venaient de Californie. On l’eût fait, c’était un vrai bonheur, c’est des gens formidables, mais l’idée de prendre un billet d’avion, de générer ça, de les faire venir juste pour deux jours de conférence, nous prenait un peu à la gorge.

Audrey : c’est-à-dire qu’il y a quelques années de ça, quand on le faisait, c’est qu’on s’arrangeait pour que les speakers derrière puissent faire un tour d’Europe. C’est-à-dire que si tu veux, OK, ils prenaient l’avion, mais ensuite en train, ils allaient redonner une conf derrière pas très loin en Allemagne ou autre machin, etc. Ils en enchaînaient plus. On essayait d’avoir ce tissage.

Tu vois, ça justifie un peu la venue. C’est quelque chose qu’on a perdu au fil des années, je pense notamment le Covid nous a achevé là-dessus. On a encore quelques personnes, on fait quelques exceptions quand il y a des gens qu’on a vraiment envie d’avoir, mais c’est vraiment exceptionnel, on le met très clairement, on ne rembourse pas les biais d’avion, on ne veut pas participer à ça. Mais on a des Belges, tu vois, par exemple, qui viennent en train, donc on a des francophones.

Walid : dernière partie, c’est une partie que je fais à chaque fois, que j’appelle les défis en fait. Et là ce que j’aimerais savoir c’est un peu quels sont vos défis, quels sont les grands sujets sur lesquels vous allez devoir travailler sur les… vous voulez travailler sur les années… les années à venir, s’il y en a.

Audrey : Greg, tu me diras si t’es d’accord avec ça, mais pour moi les sujets ils vont pas changer parce qu’en fait c’est des sujets complexes. Que ce soit en termes de diversité, quand je te parle de diversité, c’est diversité dans les participants et participantes. On veut vraiment que tout le monde se sente le la les bienvenu-e-es, que ce soit en termes d’orateurs ou d’oratrices, que ce soit en termes d’accessibilité. En fait, ces sujets-là, c’est du work in progress (NDLR : travail en cours) constant. Tu ne peux pas arriver et dire c’est bon, j’ai résolu le problème. Ça y est, c’est faux. C’est complètement faux.

C’est vraiment un travail de longue haleine. Et en même temps, tu vois, c’est ce qui est intéressant dans MiXiT, parce que j’ai été bénévole d’une autre conf avant où on ne se posait pas ces questions là.

MiXiT, en fait, il y a des moments où on s’arrache la tête, tu vois, il y a des moments où c’est ultra compliqué entre ce qu’on aimerait faire et ce que nos valeurs nous imposent. Et il y a des moments où on fait des choix, on est là, dommage, ben ça on ne le fera pas.

Et à d’autres moments, au contraire, c’est complètement l’éclate parce qu’on se dit on trouve un moyen d’aller plus loin, justement.

Tu vois, par exemple, cette année, on a fait une formation avec l’AVFT, l’association qui lutte contre les violences faites aux femmes au travail, pour nous permettre d’être en capacité si jamais une violence sexuelle devait arriver pendant la conférence, pour être sûre qu’on allait être en capacité de mettre la personne en sûreté, mais pas seulement physiquement, mais aussi psychologiquement, de l’accompagner, d’avoir un recueil de sa parole qui lui permet d’avancer elle ou lui dans la suite de ses démarches.

Pour moi, c’est continuer sur tous ces sujets-là, en fait, où on essaye toujours d’aller gratter plus loin, voir comment on peut s’améliorer.

Grégory : il y a un enjeu de… de raugmenter la visibilité aussi sur ces sujets-là, tu vois, sur la vélotypie, donc sur l’accessibilité. On sait des personnes… On a un public qui a décroché depuis pas mal de temps, qui revient progressivement parce qu’en fait, jusqu’à présent, les confs n’étaient pas équipés, donc pourquoi je m’embêterais ?

Et donc il y a un enjeu de communication aussi autour de ça, de la même manière, comme le dit Audrey, autour des violences sexistes et sexuelles, de dire, ben s’il y a besoin de parler, MiXiT, c’est un espace dans lequel vous avez des référents, et on veut qu’il y ait des choses qui se passent à MiXiT. Et c’est ça, je pense, qu’on va rechercher.

Et nos défis, c’est de faire sentir aux gens qu’ils sont les bienvenus pour participer et s’exprimer de plus en plus.

Audrey : moi, ma plus grosse fierté cette année, on a eu une keynote de clôture qui était absolument fantastique par une chercheuse qui est une militante queer, etc. et qui nous a durant sa keynote comparé à un espace queer où elle avait l’habitude d’organiser des événements. Ça, c’est mon plus gros moment de fierté en fait, en tant qu’orga, tu vois. C’est de se dire, on est identifié comme queer welcome, tu vois, c’est cool. Moi vraiment, ça me remplit de joie.

Walid : les premières confs que j’ai écouté de MiXiT, je sais plus que c’était, quelle conférence c’était, justement d’une femme qui racontait pourquoi après 10 ans d’informatique, elle a quitté l’informatique.

Audrey : ouais.

Walid : ça posait très bien les problèmes et effectivement, ça faisait beaucoup réfléchir. Donc, j’ai trouvé ça vraiment intéressant parce que c’est pas forcément des sujets qui sont très abordés ailleurs, même si ça commence un peu dans les conférences de plus, etc. Mais ça reste toujours…

Audrey : ça l’est beaucoup plus, heureusement, mais en fait… Ça l’est beaucoup plus, mais bon, on pourrait certainement aller encore beaucoup plus loin. Le problème, c’est qu’on n’a toujours pas les solutions miracles.

Tu vois, moi, je sais qu’à titre personnel, j’ai eu des expériences pas fantastiques en tant que femme et en fait je pense que c’est important d’arriver à créer des espaces. Typiquement j’ai rejoint le projet Spring parce que, bah déjà parce que c’est un projet open source que j’adorais, mais aussi parce que je savais que c’est un endroit où j’allais être à l’abri en tant que femme. Et c’est bien aussi que tu vois, il y ait des confs qui proposent ce qui propose ce même environnement. De dire tu peux venir, quelle que soit ton origine ethnique, quel que soit ton poids, quelle que soit ta couleur de cheveux, quelles que soient tes préférences sexuelles, amoureuses, ta non-binarité, tu seras toujours bienvenue en fait à MiXiT. C’est ça le truc. Et je pense que c’est important qu’il y ait des confs comme ça.

Conclusion

Walid : ok, je viens de dire que ça fait une bonne conclusion. Et avant de vous donner la parole pour la tribune libre, j’avais deux petites questions.

La première question, c’est qu’est-ce que vous diriez à une personne non technique pour présenter MiXiT ?

Grégory : à une personne non technique de venir à MiXiT, c’est que je pense que c’est un super point d’entrée justement pour se connecter à cette communauté tech. Parce qu’il y a cette ouverture et c’est l’espace qu’on souhaite créer. C’est qu’il y a l’ouverture pour tout type de personnes. Si vous venez à MiXiT, vous pourrez rentrer en contact avec quelqu’un, lui demander ce qu’il fait, ce qu’elle fait et elle vous l’expliquera cette personne avec vos mots pour être sûr que vous compreniez.

Il y a des conférences tech certes, et bien il y a des choses qui peuvent être assez abruptes, mais il y a énormément de choses par ailleurs. Donc si vous voulez voir une conférence tech pour voir ce que c’est, c’est possible. Et en plus de ça, si vous faites même des ateliers tech, je suis sûr que vous pouvez rentrer en contact avec des personnes qui vont tout vous expliquer en live. Et en plus, c’est à tous les autres sujets qui ne nécessitent aucune compétence technique pour être comprise. Encore une fois, moi, ça fait partie plutôt de la partie organisationnelle. Ok, ancien tech, ok, un peu culturé, on plus trop, on peut faire 80% des conférences. Et donc dans les 80% il y a forcément aussi des conférences.

Walid : deuxième question, qu’est ce que vous diriez à un libriste ou une personne qui travaille dans l’informatique pour présenter MiXiT?

Audrey : très bonne question. Merci Greg.

Walid : je veux présenter MiXiT à mes collègues de l’équipe produit dans laquelle je travaille, qui ne connaissent pas MiXiT. Comment est-ce que je présente ça ?

Audrey : globalement tu pourrais leur dire qu’il y a une part belle de fêtes au projet livre et au projet open source. Tu peux leur dire de soumettre, parce que moi ça m’intéresse du coup, tu vois, il faut soumettre.

Walid : mes collègues ne sont pas des libristes, je ne travaille pas dans un environnement de libristes particulièrement, mais par contre tu as dit DDD tout à l’heure, là ça parlera beaucoup à mes collègues.

Audrey : ça fait partie des sujets qu’on aime, disons que, ouais, globalement tu peux leur dire qu’il y aura une… On essaye d’avoir une diversité de sujets qui fait que chacun, chacune puisse trouver des choses qui vont en fait l’intéresser immédiatement dans son quotidien, tu vois, par rapport à son quotidien. Et puis aussi d’avoir tous ces trucs à côté un peu foufous, parfois complètement perché. Enfin tu vois, cette année on a eu un atelier menuiserie, c’était fantastique ! Je pense que c’est la meilleure chose à leur expliquer. C’est que si tu veux apprendre des choses et qu’en même temps tu veux beaucoup t’amuser, ben Mixit ça marche assez bien.

Walid : si vous voulez faire passer un message en rapport avec Mixit ou pas en rapport avec MiXiT, je vous laisse chacun quelques phrases pour conclure. Audrey ?

Audrey : bah moi je vais passer un message en fait à toutes les personnes issues des minorités non représentées dans la tech, soumettez à MiXiT. Soumettez, soumettez, soumettez, venez. Nous on a envie que, tu vois, on a envie en fait que sur scène on ait ce qu’on appelle un line-up. Un line-up, c’est ta sélection d’orateurs et d’oratrices qui ressemble un peu plus à la société dans laquelle on vit. Qu’ils viennent nous parler de choses, de problématiques que tu ne peux pas connaître si tu n’as pas un handicap ou des choses comme ça. Soumettez, venez, on a besoin de vous.

Walid : Grégory ?

Grégory : moi, je passerai un message si jamais il y a des gens qui travaillent dans des entreprises, et que vous avez des personnes qui sont sourdes, malentendantes, ou PMR, ou non-voyantes, malvoyantes, ne pas hésiter à nous contacter.

On donne des places contre du feedback (NDLR : impressions) à toutes ces personnes qu’on essaie de servir dans la conférence et qu’on sait qu’on a beaucoup d’améliorations possibles. Et on a envie que MiXiT soit un espace qui soit accessible. Et on a du mal à toucher différents publics et donc ne pas hésiter à communiquer, à dire mais allez à MiXiT, envoyez-nous un mail et on saura vous faire de la place.

Audrey: ouais et ça vaut pour, enfin ouais voilà c’est vraiment les participants, participantes. Pareil, personnes issues de minorités, enfin venez, venez à MiXiT parce que vous serez les bienvenus quoi qu’il arrive. N’ayez aucune crainte quant à une quelconque discrimination, on est un peu vénère sur le sujet, on le répète dès matin, j’ai mets code de conduite partout, donc voilà, vous êtes tous, toutes les bienvenus. Voilà.

Walid : eh ben bravo, on va s’arrêter là, l’année prochaine j’espère ne pas louper le moment de la loterie pour pouvoir essayer moi aussi de pouvoir venir.

Audrey : avec plaisir.

Grégory : on communiquera sur les pires réseaux sociaux pour que tu le saches.

Walid : moi je suis principalement sur le Fediverse, donc il ne faut pas que je loupe l’information.

Audrey : on a une newsletter si tu veux, on n’envoie que le minimum nécessaire de mails.

Walid : c’est le plus fiable. Voilà. Parfait, écoutez merci beaucoup Audrey et Grégory d’avoir pris du temps pour parler de MiXiT. J’étais vraiment très intéressé, je ne connaissais pas plus que ça, ça m’intéressait de comprendre un peu pourquoi, comment, j’avais plein de questions, vous avez répondu à tout ça, donc c’était vraiment très chouette.

J’espère avoir l’occasion de vous ré-inviter, vous ou d’autres personnes de l’organisation, pourquoi pas, pour parler des éditions futures.

Audrey : carrément.

Walid : À bientôt, et puis portez-vous bien, et puis pour les auditrices, auditeurs, comme d’habitude, n’hésitez pas à partager, et vous avez compris, il faut aussi participer à la loterie, et il faut aussi soumettre des conférences, voilà.

Audrey : ouais !

Walid : c’est votre devoir pour l’année prochaine.

Grégory : merci beaucoup Walid.

Audrey : merci beaucoup.

Cet épisode a été enregistré le 3 mai 2024.

Licence 

Ce podcast est publié sous la double licence Art Libre 1.3 ou ultérieure – CC BY-SA 2.0 ou ultérieure. 

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